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de gouvernement, bien comprise, donne accès à la magnanimité des sentimens. Ceux de Boyer furent empreints de ce caractère, car il oublia que Christophe avait été le meurtrier de son frère, pour ne songer qu’à protéger sa famille et à l’entourer d’égards et de considération.

Mais, quand on songe à la conduite qu’il a tenue envers cette famille, envers celle de Dessalines qu’il trouva également au Cap-Haïtien ; quand on sait qu’en 1822, la nièce de Toussaint Louverture, Madame Isaac, revint à Haïti pour réclamer la mise en possession des biens que ce chef y avait légitimement acquis, que Boyer accueillit cette dame avec une bienveillance distinguée, qu’il fit remettre ces biens à elle et son mari, malgré leur résidence à l’étranger quand on se rappelle qu’en cela il suivit non-seulement les inspirations de son cœur, mais le bel exemple que Pétion lui avait tracé par sa conduite envers la famille de Rigaud, aux Cayes quand on écrit ces faits si noblement accomplis pour relever la dignité de toute une race d’hommes, jadis avilis et persécutés sur cette terre d’Haïti, et que l’histoire vous présente en regard l’insensibilité, les procédés malveillans dont on usa en 1843 envers la famille de Boyer, on se demande, malgré soi, quel est donc ce vertige qui s’empara de ceux qui s’en rendirent coupables ?…


Au moment où la famille de H. Christophe partait paisiblement du Port-au-Prince, un autre personnage s’y conduisait de manière à être contraint de quitter cette ville, sous de fâcheux auspices pour le caractère sacré dont il était revêtu. Il s’agit de M. de Glory, évoque et vicaire apostolique.

Depuis son arrivée, son ancienne querelle avec l’abbé Jérémie s’était ravivée sourdement entre eux dans le près-