On ne doit pas douter de la répugnance avec laquelle j’ai terminé cette affaire : je me trouvais vis-à-vis de Saint-Domingue, dans la même position où mon frère s’était trouvé vis-à-vis de la France ; il y avait trois partis à prendre : celui de faire la guerre, celui d’abandonner Saint-Domingue et les colons, enfin, le troisième était de transiger ; c’est celui que nous avons adopté et que mes ministres ont dû poursuivre. »
Si telle était la pensée personnelle de Charles X, voyons aussi quelle était celle de son ministère présidé par M. le comte de Villèle, d’après le même historien :
« Depuis une année, dit-il, quelques négociations avaient été ouvertes avec le Président de la République d’Haïti, dans le but de régler les conditions d’une émancipation longtemps sollicitée. Le conseil du roi, appelé à régler ces conditions, délibéra sur plusieurs projets de traités[1] ; et afin tout à la fois d’obtenir une indemnité considérable, des concessions pour le commerce, sans blesser trop ouvertement les croyances royalistes, le cabinet arrêta les points suivants : 1° que l’émancipation serait faite par ordonnance, c’est-à-dire dans la même forme qu’avait été concédée la charte française ; par là on répondait à toutes les plaintes que la droite[2] aurait pu faire entendre ; 2° l’indemnité fut fixée approximativement aux pertes que les colons avaient éprouvées, déduction faite de leurs dettes ; 3° on stipulerait
- ↑ On peut voir aussi, dans l’ouvrage de M. Lepelletier de Saint-Rémy, tome 2, pages 39 à 46, tout ce qui se passa dans le conseil des ministres sur cette question.
- ↑ La droite, c’est-dire les ultra-royalistes qui exerçaient une grande influence dans les deux chambres et sur le roi personnellement.
classe innocente qui seconda les colons dans leur trahison envers la France, en livrant cette colonie aux Anglais. Le vicomte de Bruges a figuré au Port-au-Prince et au Mirebalais, en 1795. Voyez tome 3 de cet ouvrage, p. 59 et 60.