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Cependant, tout étant disposé pour la cérémonie du 11 juillet, le Président d’Haïti adressa au Sénat le message suivant, en date du 10 :


xxx« Citoyens Sénateurs,

» Sa Majesté le Roi de France ayant reconnu, par son ordonnance du 17 avril dernier, l’indépendance pleine et entière du gouvernement d’Haïti, et Monsieur le baron de Mackau, qui en est porteur, m’ayant donné officiellement toutes les explications que je désirais pour la garantie nationale, j’ai accepté ladite ordonnance. Monsieur le baron de Mackau doit, d’après mon invitation, la présenter demain matin à votre adhésion : je ne doute pas, qu’appréciant les motifs qui ont guidé ma détermination, vous ne procédiez à l’entérinement de cet acte selon les formes voulues par nos institutions[1].

» J’ai la faveur de vous saluer avec une haute considération,

 » Signé : Boyer. »

Entériner est un terme de jurisprudence qui signifie « ratifier juridiquement un acte qui ne pourrait valoir sans

    il était bien permis aux Haïtiens de penser de même par rapport à son ordonnance et à la présence de la flotte dans la rade du Port-au-Prince. Mais si le Président avait fait savoir au public que c’était avec son consentement que le Rusé allait l’y appeler, on n’eût pas éprouvé ce sentiment ; car on crut généralement que c’était malgré lui.

  1. On remarquera encore que si les sénateurs appelés on conseil privé n’eurent point connaissance de la copie de l’ordonnance, le Sénat ne reçut pas non plus communication des explications écrites de M. de Mackau. Or, ce corps ayant le pouvoir de sanctionner ou de rejeter l’acceptation de l’ordonnance par Boyer, celui-ci aurait dû lui donner connaissance aussi de ces explications écrites pour mieux obtenir son adhésion. Et puis, avant de faire publier le programme du 8 juillet, il aurait dû adresser son message qui fut tardif. En conseil privé, les sénateurs ne formaient pas le Sénat. Cet oubli des formes et de convenances envers ce corps contribua beaucoup à exalter l’opinion publique par la suite.