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où Ferdinand VII se trouvait alors, cette combinaison entre lui et le gouvernement français ne pouvait plus s’effectuer, si toutefois elle avait été conçue.

Presque en même temps que J.-J. de Sylva, le commodore Aury était venu aussi au Cap-Haïtien auprès de Boyer, pour lui proposer : « d’aider la République à s’emparer de la partie de l’Est, assurant que ce pays serait bientôt en proie à l’anarchie, attendu qu’un petit nombre d’ambitieux, s’opposant au vœu de la population entière, prétendaient y organiser une république indépendante sous la protection de la Colombie[1]. » Sa proposition avait été rejetée par les mêmes motifs énoncés à Sylva, et parce que surtout le Président ne se fût jamais prêté au concours d’aucun étranger dans les affaires politiques de son pays.

Quant à Aury, on peut croire qu’il était sincère en faisant sa proposition, et qu’en soufflant l’esprit d’indépendance dans le Nord-Est, il n’entendait pas conseiller ses habitans de s’unir à la Colombie. Notre opinion à ce sujet se fonde sur les procédés de Bolivar envers lui, aux Cayes, qui avaient excité son juste mécontentement, et sur la générosité de ceux de Pétion à son égard[2]. Après avoir amené dans cette ville les fugitifs de la Côte-Ferme, il avait vu Bolivar donner le commandement de la flotille à Brion, pour retourner dans leur patrie. Il pouvait donc garder du ressentiment contre Bolivar, tandis qu’il éprouvait pour la

  1. Extrait de la brochure publiée en 1830 par le gouvernement haïtien, sur la réunion de l’Est.
  2. Voyez à la page 186 du 8e volume de cet ouvrage, ce que Pétion ordonna en sa faveur. Aury était Français et ancien contre-maître dans le port de Toulon. Les autres capitaines de corsaires placés sous ses ordres étaient des Français également. Ils étaient tous des républicains, désireux de propager leurs idées dans les contrées de l’Amérique, et opposés à la restauration des Bourbons en France.