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Ce dernier souscrivit sans hésiter à la révolution prévue par lui et qu’il était impuissant à empêcher : il demanda, pour prix de sa facile condescendance, la permission de se retirer à l’étranger avec sa famille et ceux des officiers ou fonctionnaires publics qui restaient fidèles à l’Espagne. Rien ne convenait mieux à Nunez et aux autres révolutionnaires qui allaient se mettre à leur place ; car c’est toujours là le plus délicieux résultat de toute révolution.

Celle du 1er décembre s’effectua ainsi sans coup férir. Au jour, la population de Santo-Domingo se réveilla indépendante de l’Espagne et vit le pavillon colombien substitué à celui de cette ancienne métropole. Nunez et ses collaborateurs avaient préparé les deux principaux actes qui devaient faire connaître au monde entier, l’existence de l’État qu’ils fondaient. C’étaient : 1º la déclaration d’indépendance du peuple dominicain ; 2º l’acte constitutif du gouvernement provisoire de l’État indépendant de la partie espagnole d’Haïti.

Le premier récapitulait tous les torts de l’Espagne envers la plus ancienne de ses colonies en Amérique, tous les griefs des habitans de celle-ci, à partir de l’ordre qu’envoya le Divan espagnol pour démolir les villes maritimes de Bayaha, Yaguana, Monte-Christ et Puerto de Plata[1]. Il rappelait, au contraire, les nombreuses preuves de dévouement et de fidélité que les habitans avaient toujours données à l’Espagne, notamment en se révoltant contre les

  1. En 1606, la cour d’Espagne ordonna la démolition et l’abandon de ces villes pour concentrer leur population dans l’intérieur de l’Est de la colonie, vu le dépeuplement de celle-ci. Les reproches de Nunez de Cacérès remontaient à une époque bien reculée ! Bayaha devint le Fort-Dauphin des Français, Yaguana, la ville de Léogane, quand ils s’établirent dans la partie occidentale d’Haïti.