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portée de tout voir par ses propres yeux, pour se convaincre qu’Haïti était autre chose que Saint-Domingue.

Quels risques pouvait-on courir en le laissant pénétrer à Haïti ? La République était habitée par des hommes libres et indépendans de fait comme de droit, dont la résolution de se maintenir tels était irrévocable, comme celle de leur chef était de leur garantir ces droits légitimes. Il possédait leur confiance par sa manière de gouverner l’État, et aucune trahison n’était à craindre entre lui et ses concitoyens. L’agent de la France pouvait donc venir en toute sûreté ; on entendrait son langage, ses propositions, et on lui répondrait selon que l’intérêt général le conseillerait. Après toute lutte, toute guerre entre les peuples, n’arrivent-ils pas toujours à des propositions de paix, à des conventions qui sont discutées entre leurs représentans ? La situation d’Haïti à l’égard de la France n’était que cet état de choses.

Le 24 septembre, Pétion écrivit à D. Lavaysse, qu’il pouvait venir auprès de lui et qu’il serait reçu avec égards, avec le respect dû au Souverain qui l’envoyait. Trouvera-t-on ces termes peu convenables, marquant de la faiblesse, de la crainte ? Si les hommes, comme individus, se doivent mutuellement des égards et du respect, par la même raison, les États et leurs chefs se doivent ces considérations qui ne dérogent nullement à leur dignité.


Mais les trois agents étaient tombés malades à Kingston. Après leur rétablissement Franco de Médina partit pour Puerto-Plata où il arriva le 20 octobre ; de là il alla voir ses parens à Santo-Domingo, son lieu natal, et revint à Saint-Yague. Dravermann, ayant plus souffert à cause de son grand âge, et apprenant que le général