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se rendissent sur les marchés des autres pays, qu’ils fissent connaître leur aptitude dans le négoce, indépendamment de leur bonne foi dans la gestion des marchandises qui leur seraient adressées. En s’abstenant de telles démarches, les commerçans haïtiens ne devaient pas s’étonner que les étrangers établis dans le pays leur fussent préférés pour la consignation des navires et de leurs cargaisons[1].

L’hôtel des monnaies fondé au Port-au-Prince fonctionnait déjà en mai. En conséquence, le sénat publia un décret et une loi à ce sujet, dans le même mois.

Par le décret, le trésor public fut autorisé à émettre des billets de caisse ou papier-monnaie, pour la valeur de 120 mille gourdes en coupons de 5, 50, 100 et 500 gourdes, afin de retirer de la circulation la petite monnaie appelée d’Haïti, mais en faisant subir aux détenteurs une perte de moitié des sommes qu’ils posséderaient. Les domaines nationaux furent hypothéqués en garantie du remboursement final de ces billets de caisse, qui seraient reçus dans les transactions entre particuliers. Au lieu de la somme de 120 mille gourdes, le trésor fut contraint d’émettre des billets pour celle de 300 mille gourdes, attendu qu’on lui fournit 600 mille gourdes de fausse monnaie fabriquée par tout le monde. Chacun ayant la conscience d’avoir agi en violation du droit souverain de l’État, en frappant monnaie plus ou moins publiquement, personne ne réclama contre la perte subie.

D’après la loi, les pièces de la nouvelle monnaie natio-

  1. À l’époque où nous écrivons ces lignes, les commerçans haïtiens paraissent convaincus qu’il est de leur intérêt et de celui du pays, d’aller à l’étranger et principalement en Europe, afin d’établir des relations fructueuses avec les manufacturiers : c’est une tendance que le gouvernement national doit favoriser par tous les moyens possibles.