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Le bruit qu’il produisit fit résonner les échos du Nord et les voûtes de Sans-Souci, et troubla le sommeil du Lion qui habitait ce palais : il en frémit. Le Lion sentit qu’il ne pouvait plus se réveiller comme en 1812 ; sa dernière tournée à Saint-Marc, deux années auparavant, lui en avait laissé la profonde conviction. Reconnaissant son impuissance et frappé du pressentiment de sa fin prochaine, il dut aviser. Que faire dans une telle occurrence, pour préserver ses États de toute entreprise de la part de la République triomphante, qui, dans sa virilité active, semblait les menacer ? Appeler le Léopard à son aide, afin de conjurer ensemble cet orage. Telle fut la résolution du Tyran.

À cet appel fait à sa philanthropie incontestable, l’amiral Sir Home Popham, dont la destinée était de mourir aussi dans la même année, se rendit au Cap-Henry et fut accueilli par le Roi d’Haïti avec les plus grands honneurs. Ce Roi le supplia d’aller au Port-au-Prince, afin de persuader le Président d’Haïti de ne rien entreprendre contre son royaume, attendu qu’il était de l’intérêt de tous les Haïtiens, sans cesse menacés d’une invasion de la France, de vivre en paix, d’unir leurs forces au besoin pour repousser l’ennemi commun[1]. Convaincu de ces sages dispositions, des bonnes intentions qui animaient Henry Christophe, l’amiral souscrivit à ses ardens désirs.

Il arriva au Port-au-Prince le 27 avril, sur la frégate la Cybèle, commandée par son propre fils, accompagné de celui du duc de Manchester, gouverneur général de la

  1. Dans le même mois d’avril, l’ancien général du génie Vincent, pi avait servi dans le Nord, faisait des démarches en faveur de Christophe auprès du gouvernement français. J’ai lu un document à ce sujet, au ministère de la marine.