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à le remplacer ; l’accueil que celui-ci reçut dans toute l’étendue de l’État ; l’impuissance où se trouvait le cruel tyran du Nord de renouveler ses attaques : tout prouvait que l’œuvre de Pétion était consolidée à jamais. Il n’y avait plus, désormais, qu’à en recueillir les doux fruits au profit de la nation haïtienne.

Mais, si la République était assurée de son avenir à l’intérieur, elle ne pouvait se dissimuler que la question extérieure de son indépendance politique restait encore sans solution. Pour amener cette solution et conquérir aussi l’avenir sous ce rapport, elle n’avait qu’à maintenir son union ; car l’union, c’est la force, c’est le secret d’être invincibles.

Dans cette pensée, le chef qui la gouvernait, ouvrit l’année 1819 par la célébration pompeuse de la fête de l’indépendance nationale. Il y prononça le premier de ce discours chaleureux et éloquens qu’il renouvela souvent à pareil jour sur l’autel de la patrie, en prêtant le serment consacré dès le 1er janvier 1804. Dans la circonstance qui nous occupe, il eut à faire appel à la mémoire du grand homme dont la cendre repose au pied de l’arbre de la Liberté ; et cette partie de son discours fit prêter avec plus d’enthousiasme le serment national, par l’armée et les citoyens qui l’entouraient[1].

  1. F. Darfour, arrivé dans le pays depuis six mois seulement, saisit l’occasion de cette fête nationale pour présenter une adresse imprimée : « Aux citoyens vénérables chefs de la République d’Haïti, » afin de leur exposer des considérations générales sur la manière dont, selon lui, il fallait gouverner la République pour former des citoyens dévoués à la patrie, etc. Cet écrit, que nous avons sous les yeux, offre un résumé de l’histoire de Grèce et de Rome, avec quelques citations relatives aux Chinois et aux Suisses. Darfour y faisait le parallèle de l’Angleterre et de la France, en disant de celle-ci « qu’elle était semblable à un épileptique agité du mal caduc et tourmenté depuis 29 ans par toutes les convulsions révolutionnaires. » Il semblait lui-même vouloir se poser en Réformateur de tout ce qu’il voyait dans le pays qui venait de l’adopter pour citoyen.