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universellement partagé : Célie sera l’enfant adoptive de la Nation ! Car on savait que Pétion ne lui laissait point de fortune[1].

Dès le 29, dans la matinée, le Secrétaire d’État Imbert avait fait publier une Adresse au peuple et à l’armée, pour annoncer l’événement déplorable qui privait la République de son chef. Cet acte disposa que ses obsèques seraient célébrées avec pompe, que son corps serait déposé sur la place du Champ de Mars au pied de l’arbre de la Liberté qu’il y avait fait planter, ses entrailles au fort National et son cœur remis à sa famille. L’armée et les fonctionnaires publics durent porter le deuil durant trois mois. À la réception de l’adresse dans les arrondissemens, le canon de deuil serait tiré dans chaque place, de dix en dix minutes pendant 24 heures, et la cérémonie des obsèques y serait figurée comme elles se feraient à la capitale. Là, le général Boyer, commandant de l’arrondissement, fut chargé de tout faire pour donner de l’éclat à la cérémonie.

En conséquence, il publia un programme qui prescrivit le tir du canon de deuil, dans tous les forts de la ville et par les bâtimens de la flotte, le glas funèbre des cloches de l’église, et de mettre le pavillon de la République à mi-mâts[2]. La chapelle ardente du palais, comme l’église, durent être tendues de deuil, quatre généraux gardant le corps placé sur le lit de parade, le péristyle de l’édifice et ses avenues, jonchés de feuillages et de fleurs. Enfin, l’ordre de la marche des troupes de la gar-

  1. « Au moment de l’enlèvement du corps du défunt, sa fille, l’affligée Célie, est aussi venue faire les derniers adieux aux mânes de son père… Intéressante pupille du Peuple haïtien, tu nous as déchiré le cœur par la touchante invocation ; il nous a fallu toute la maturité de l’âge pour ne pas tomber de faiblesse avec toi… » — Abeille haïtienne.
  2. Ces choses se firent durant trois jours consécutifs.