Page:Ardouin - Étude sur l’histoire d’Haïti, tome 8.djvu/315

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

À la fin de février, le général Borgella arriva au Port-au-Prince[1]. Le but de son voyage était de se plaindre de ce que, depuis assez longtemps, l’administration des finances lui faisait payer très-rarement les émolumens de son grade militaire, et d’une décision rendue par Pétion au sujet d’une maison qui lui avait été donnée pour logement, dès qu’il parvint au généralat, conformément aux lois de cette époque. Une dame ayant réclamé cette maison, située aux Cayes, comme sa propriété, avait produit, pour en obtenir la mise en possession, un acte irrégulier, contraire aux dispositions de l’arrêté de Dessalines en date du 7 février 1804 et des lois subséquentes, et le président avait été ainsi induit en erreur[2]. Pour former sa réclamation à cet égard, Borgella était parvenu à se procurer des documens, tant de la Jamaïque que de l’administration des Cayes, qui prouvaient que cette maison avait été légalement confisquée au profit de l’État, dès 1804. Comme il était privé des loyers qu’il en retirait, et en même temps de ses émolumens, il se trouvait réduit à une situation précaire sur son habitation de Cavaillon où il résidait : la plupart des travailleurs qui la cultivaient, étant devenus petits propriétaires, en étaient sortis, et par conséquent les revenus de cette habitation suffisaient à peine à son existence.

    Faut-il appuyer cette déclaration par une opinion mieux formulée ? La voici : «… Mais l’historien ne jouit pas de ce privilége-là ; son premier devoir est de mettre ses sympathies personnelles de côté, et de ne demander aux faits que ce qu’ils contiennent. Un historien est bien libre d’aimer tel pouvoir qui échoue et de ne pas aimer tel pouvoir qui réussit, mais il n’est pas libre de ne pas rechercher les causes du succès et de l’insuccès… »

    M. Paulin Limayrac.

  1. Borgella logea chez mon père, comme il en avait l’habitude : c’est ainsi que j’ai pu savoir les particularités qu’on va lire.
  2. Dans un voyage que Daumec fit aux Cayes, il se chargea de présenter cette demande de mise en possession et il l’obtint pour cette dame.