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n’avez de tranquillité et de satisfaction à espérer, que dans la stricte exécution de vos obligations, puisque vous êtes les serviteurs du peuple. »

Qu’avaient à dire « les fonctionnaires de tous les rangs », — généraux commandans d’arrondissemens, colonels commandans de communes, administrateurs des finances, etc., — lorsque les grands fonctionnaires eux-mêmes étaient menacés par la chambre, d’être contraints à rendre compte de leur administration, parce qu’elle l’exigerait d’eux[1] ?

Et que l’on ne croie pas que, dans nos observations, il entre aucune malveillance à l’égard de cette institution ; car elles tendent seulement à constater une situation historique qui était dans la nature des choses, et qui corrobore, nous le croyons, ce que nous avons dit plus avant en analysant la constitution de 1816.

En effet, on voit que, dès sa première session, la chambre des représentans visait constamment à se poser aux yeux de l’armée, — de la force agissante, — comme sa protectrice naturelle ; qu’elle lui donnait l’assurance qu’on pourrait aisément la payer et l’entretenir régulièrement, d’après la loi du budget et la connaissance qu’elle avait prise de l’état des recettes ; qu’elle menaçait de son omnipotence, depuis les grands fonctionnaires jusqu’aux plus petits employés de l’État : et dans quel but ? D’exercer

  1. En 1843, Inginac s’est vanté d’avoir été le premier à proposer l’institution de la chambre des représentans ; mais il a oublié sans doute de dire si, en 1817, après cette adresse, il ne fit pas son meâ culpâ. En publiant ses Mémoires, peut-être pouvait-il dire : meû maxima culpâ  ; car il était accusé et en exil, par suite du triomphe de l’Opposition de la chambre. À la page 61 de ces Mémoires, il a dit cependant qu’il fut « celui qui conseilla aux membres de la chambre de faire une adresse à leurs constituans, pour leur rendre compte des travaux de chaque session. » Si le fait est exact, ce fut une faute de sa part : en sa qualité d’homme d’État, il ne devait pas la commettre.