Page:Ardouin - Étude sur l’histoire d’Haïti, tome 8.djvu/258

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

France gouvernée par la légitimité ? Leurs chefs ignoraient-ils tout ce qui se passait déjà en France et dans ses colonies, dès la chute de Napoléon ?[1]

La France elle-même n’avait pas confiance dans les Bourbons revenus à la suite des armées étrangères[2].

Le 12 novembre, le jour même du départ des commissaires français, le Président d’Haïti fit paraître une proclamation au peuple et à l’armée, où il rendait compte de leur mission en ordonnant l’impression de toutes les pièces de la négociation. En félicitant ses concitoyens d’avoir montré en cette circonstance, comme en 1814, le même respect pour le droit des gens, il leur dit :

« Il n’existe pas un Haïtien dont l’âme soit assez tiède pour consentir à revenir sur les pas que notre gloire a franchis. Nos droits sont tracés ; nous les puisons dans la nature ; elle nous a créés égaux aux autres hommes ; nous les soutiendrons contre tous ceux qui oseraient concevoir la coupable pensée de nous subjuguer. Ils ne trouveraient sur cette terre, que des cendres mêlées de sang, du fer et un climat vengeur… L’autorité repose sur votre volonté, et votre volonté est d’être libres et indépendans. Vous le serez, ou nous donnerons cet exemple terrible à l’univers, de nous ensevelir

  1. Le même auteur a signalé la prédiction remarquable de Pétion, faite a D. Lavaysse sur le retour de Napoléon de l’île d’Elbe et la fuite des Bourbons. Pétion n’a pu pressentir cet événement, que parce qu’il savait comment ces derniers gouvernaient la France. Et en 1820 encore, les Bourbons légitimes n’y faisaient-ils pas défendre le mariage entre les femmes blanches et les mulâtres ou noirs, en ressuscitant les vieilles ordonnances de Louis XV et de Louis XVI ?
  2. De nos jours, nous trouvons l’appréciation suivante sur le Constitutionnel du 22 mars 1857 :

    « La Restauration eut tous les malheurs. Ce n’était pas assez de représenter forcément l’esprit d’émigration ; elle arrivait à la suite de l’étranger, avec un Fils aîné de l’Église presque athée, et sous la haute protection de M. de Talleyrand. »

    xxxx(M. Paulin Limayrac, à propos des Mémoires du duc de Baguse).