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clarant son indépendance, le peuple d’Haïti l’a fait à l’univers entier, et non à la France en particulier. Rien ne pourra jamais le faire rétrograder de cette inébrantable résolution. Il sait par l’expérience de ses malheurs passés, par ses plaies qui saignent encore, que sa garantie ne peut être qu’en lui-même et sans partage ; il a mesuré toute la force et l’étendue de sa démarche, puisqu’il a préféré se vouer à la mort plutôt que de revenir sur ses pas, sans avoir l’intention de se mettre en état d’hostilité contre qui que ce soit. C’est au nom de la Nation dont je suis le chef et l’interprète, que je vous ai parlé. Je ne compromettrai jamais sa souveraineté, et ma responsabilité est de me conformer aux bases du pacte social qu’elle a établi. Le Peuple d’Haïti veut être libre et indépendant, je le veux avec lui. Pour changer d’institutions, c’est la Nation qui doit se prononcer, et non le chef. »

Si les propositions formulées par les commissaires français tendaient à faire reconnaître la souveraineté du Roi de France, qui aurait ensuite l’air de laisser à Haïti, — à Saint-Domingue, voulons-nous dire, — le droit de se gouverner par ses propres lois ; cette fois, la réponse de Pétion leur disait très-catégoriquement, que le peuple haïtien étant libre et indépendant, entendait bien exercer la souveraineté qui résulte de l’indépendance : il n’avait d’ailleurs jamais compris autrement la question à résoudre entre Haïti et la France.

En résumé, cette mission ne présentait qu’une variante de celle qui l’avait précédée en 1814, à part la perfidie que la première dévoila dans le plan prescrit aux agents par le ministre Malouet. Mais si les Haïtiens avaient pu faire la sottise de se laisser séduire par le nouveau