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point, et que les pouvoirs dont vous êtes revêtus se rapportent avec cet esprit de justice et de modération, alors, oubliant tout motif particulier, et guidés par le pur sentiment de la vérité et le désir d’opérer le bien, vous nous regarderez comme un gouvernement libre et indépendant, dont les institutions consolidées reposent sur la volonté et l’amour national. Vous n’hésiterez pas à l’admettre comme base essentielle entre nous ; et en entrant par là dans l’esprit de nos lois, vous me mettrez à même, dans le cercle de mes devoirs, de pouvoir correspondre avec vous sur tous les points qui pourraient être réciproquement avantageux aux deux gouvernemens. »

Il résulte de tout l’ensemble de cette lettre, que le mot gouvernement fut mal employé, que c’était bien du peuple qu’il s’agissait, lequel avait proclamé son indépendance, et avec elle sa souveraineté. Les commissaires français feignirent de s’y méprendre, et bientôt l’on verra leur combinaison à ce sujet. La dernière partie de la lettre du président leur laissait néanmoins entrevoir que, la reconnaissance de ces deux droits étant admise comme bases des négociations, il pourrait s’entendre avec eux sur des conventions qui seraient également dans l’intérêt de la France et d’Haïti. Il ne pouvait être question que de l’indemnité déjà proposée en 1814, et du rétablissement des relations commerciales entre les deux pays, d’une manière franche, et non de la manière que cela se pratiquait déjà[1].

  1. Il paraît même que dans les entretiens que Pétion eut avec les commissaires, il leur aura renouvelé la proposition de l’indemnité et d’un traité de commerce. — Voyez M. Lepelletier de Saint-Rémy, t, 2, p. 23. Mais, d’après la combinaison qu’ils proposèrent à leur tour et que l’on verra bientôt, il est clair qu’ils écartèrent la proposition du président.