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Dirai-t-on, qu’alors le Président d’Haïti aurait dû appeler dans les fonctions de grand juge et de secrétaire d’État, des hommes habiles à soutenir ses projets par la parole ? Mais, combien en eût-il trouvé parmi ceux de cette génération qui était au pouvoir, qui avait fondé la patrie, et qu’il ne pouvait écarter de tels emplois ?

Si la discussion publique est sans contredit une condition nécessaire, inévitable de l’existence d’une chambre de représentans, et que la force des choses obligea à faire autrement que ne le prescrivait la constitution, mieux valait donc laisser le sénat seul revêtu du pouvoir législatif, en continuant sa formation selon le système de 1806, par des candidats présentés par les assemblées électorales des départemens, mais choisis parmi tous les citoyens et non plus parmi les fonctionnaires[1].

Est-ce que la représentation nationale pouvait mieux résider dans la chambre formée de membres élus dans les communes, que dans le sénat composé de citoyens pris dans les départemens ? C’est le patriotisme éclairé qui la constitue réellement, si, aux lumières qu’il possède, il réunit les vertus sociales[2].


Quoi qu’on puisse dire des idées que nous venons

    devant la chambre et le sénat, afin de discuter les lois, de donner des explications, etc. Mais, à moins qu’il n’eût voulu violer la constitution, qui avait désigné pour cette fonction le secrétaire d’État et le grand juge, — ou qu’il n’eût conseillé la révocation des citoyens Imbert, Fresnel et Voltaire, cela devenait impossible : ils étaient propres aux grandes charges qu’ils exerçaient, mais non pas à discuter en séance publique.

  1. Dans ce système de 1806, un tiers des membres du sénat cessait d’y siéger tous les trois ans ; les remplaçons y arrivaient avec les idées nouvelles de chacune de ces périodes, mais ils y trouvaient aussi l’esprit de tradition dans les deux autres tiers en fonction : de ce mélange devait naître l’esprit de conservation allié à celui de progrès. Tel était du moins le but que se proposait d’atteindre la constitution de 1806.
  2. Peut-être qu’un Conseil d’État, placé près du Président d’Haïti, eût produit de grands avantages pour le pays, par l’examen calme de toutes les questions d’administration publique qui auraient pu motiver des projets de lois. Les membres d’un tel corps délibérant,