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blique des projets de lois dans ces deux corps. C’est ce que faisaient bien entendre aussi les articles 55 et 153, disant que : « les projets sont discutés, adoptés ou rejetés par la chambre qui, dans les cas, motive son rejet. »

Eh bien ! par ce motif même et par les autres considérations exposées ci-dessus, nous n’hésitons pas à dire qu’à notre avis, la chambre des représentans fut une institution prématurée pour la République, à cause du peu de lumières réelles répandues dans la société ; c’està-dire, des connaissances pratiques des affaires de l’État. On s’exposait ainsi à des discussions publiques propres seulement à animer les passions déraisonnables, à provoquer un amour-propre immodéré et d’autant plus exalté, que les orateurs seraient dans l’erreur sur les choses mises en discussion.

Si ceux du pouvoir exécutif se montraient au-dessous de leur tâche, le gouvernement aurait perdu son prestige aux yeux du peuple : ce qui eût été un grand danger pour le pays. Aussi a-t-on vu la première session de la chambre des représentans, en 1817, se passer entièrement sans que ni le secrétaire d’État des finances, ni le grand juge s’y soient présentés une seule fois, non plus qu’au sénat, pour exposer les motifs des projets, discuter les nombreuses lois qui furent promulguées pendant cette année. Et pourquoi ? parce qu’on savait que le premier de ces grands fonctionnaires surtout n’aurait pu soutenir une discussion à l’avantage du gouvernement. Cet état de choses s’est perpétué durant vingt-six ans, et par la même cause, — à raison des personnages chargés de le représenter devant la chambre ou le sénat[1].

  1. Dans les pages 60, 68, 77 et 85 de ses Mémoires, l’ex-secrétaire général Inginac a prétendu avoir constamment insisté pour que des orateurs du gouvernement comparussent