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employé, ni de jouir du droit de citoyen, ni acquérir de propriété dans la République. »

Cet art. 38 et le premier membre du 39e étaient identiques aux art. 27 et 28 de la constitution de 1806 ; mais le second membre du 39e revenait aux dispositions de celle de 1805, en y ajoutant encore l’exclusion particulière de tout blanc des emplois. Cette expression doit s’entendre, selon nous, des emplois qui constituent des fonctions publiques créant une position politique pour ceux qui les exercent, puisque les seuls blancs déjà reconnus Haïtiens, dès 1804, étaient citoyens et en exerçaient les droits. S’il n’en était pas ainsi, cette disposition eût été une absurdité compromettante pour Haïti même, parce qu’elle aurait privé le gouvernement de la faculté d’employer des Européens, moyennant rémunération convenue, à faire des choses dans l’intérêt du pays, qu’aucun Haïtien ne pourrait exécuter faute de lumières ou de connaissances nécessaires. Aussi a-t-on vu Pétion, qui avait certainement la pensée intime de la constitution revisée, employer peu après des Français comme professeurs au lycée national[1].

On n’a qu’à se rappeler la situation où se trouvait Haïti depuis la paix générale de 1814, après la mission de D. Lavaysse et consorts, pour comprendre ce retour aux dispositions de 1805, qui avaient été élaguées dans la constitution de 1806. La France ne se prononçait pas à l’égard de son ancienne colonie, tout annonçait de sa part l’intention de la recouvrer d’une manière ou d’une autre.

  1. La loi rendue pour autoriser l’emploi de marins étrangers à bord des navires haïtiens voyageant au long cours, vient en aide à notre interprétation. D’ailleurs, le pays a toujours accueilli et employé les prêtres catholiques étrangers, dont le saint ministère ne rencontre point d’obstacle dans la loi politique.