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réunissait l’élite de la société du Port-au-Prince dans sa demeure privée, pour faire commettre une telle atrocité ? La vie entière de Pétion dépose contre une pareille supposition[1].

Mais, c’est la fatalité attachée à tous les gouvernemens, même les mieux intentionnés, d’être solidaires, responsables des faits criminels commis de leur temps et dont il leur est impossible de découvrir les auteurs, surtout s’il s’agit de crimes politiques. Ces crimes leur sont attribués presque toujours, quand on ne peut être convaincu du contraire.

Eh bien ! ajoutons, sans les garantir, les données particulières que nous avons sur l’assassinat du général Delva.

Bien longtemps après qu’il fut commis, nous avons appris par diverses voies, sous le gouvernement du président Boyer (d’autres le savent comme nous), que J.-B. Beaugé, le meurtrier de Sangosse, dont il a été question au chapitre 1er de ce livre, aura déclaré à plusieurs personnes, que ce fut lui-même, Beaugé, qui tua le général Delva dont il était l’ennemi personnel ; et voici comment il aura raconté les circonstances de cet assassinat :

Il a prétendu qu’il fut sollicité à cette abominable action par le général Boyer, alors commandant de l’arrondissement du Port-au-Prince, parce que, disait-il, ce général n’aimait pas Delva ; que Boyer l’aurait fait venir plusieurs fois chez lui, afin de le persuader que Delva était un homme dangereux qui, en sortant de prison, nuirait considérablement au pays ; qu’à force d’instances et de

  1. Ce crime devint une sorte de bonne fortune pour Christophe ; il en fît accuser Pétion dans les écrits publiés au Cap.