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présenter à Haïti, comment ils devaient s’y prendre pour s’aboucher avec Christophe, Pétion et Borgella, quel était le but final que se proposait le gouvernement français par l’envoi de ces agents. Il suffirait de savoir que son ministre était un ancien colon de Saint-Domingue, pour présumer de ce qu’il a pu leur tracer ; mais l’histoire doit faire connaître le plan qu’il espérait mettre à exécution.

Dans l’ivresse de sa présomption sénile, résultant de la facile Restauration des Bourbons sur le trône de France, ce septuagénaire disait d’abord aux agents :

Partant, il est singulièrement recommandé à MM. Dauxion Lavaysse, Médina et Dravermann, de se rapprocher le plus qu’il leur sera possible de l’ancien ordre de choses colonial… Ils doivent partir de ce principe : — que le Roi ne concède que parce qu’il veut concéder, et que bien loin d’admettre des prétentions exagérées, il n’accordera rien et fera sentir sa puissance dans toute son étendue, si ses faveurs sont repoussées… Sa Majesté suspend toute mesure de rigueur, et elle n’envoie pas la plus petite force dans les parages de Saint-Domingue… mais au retour des agents à qui ces instructions sont données et d’après leur rapport, S. M. fera partir des forces suffisantes pour protéger, ou, si cela devenait nécessaire, des forces auxquelles rien dans l’île ne saurait résister.

Ensuite, supposant Pétion et Borgella, en leur qualité de mulâtres, plus enclins que Christophe à favoriser les vues et les desseins de la France, le ministre disait aux agents :

Une fois d’accord avec Pétion et Borgella sur ce qui les concerne eux-mêmes, et sur ce qui regarde la 1re classe des gens de couleur, les agents établiront avec eux la mesure moindre d’avantages à accorder à la 2e classe, composée de ce qui est moins blanc que franc mulâtre, sans être tout à fait nègre, et à la 3e, composée de nègres libres.