Page:Ardouin - Étude sur l’histoire d’Haïti, tome 7.djvu/62

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

il s’évada pendant les représailles sanglantes de 1804. Les prêtres préservés de ces vengeances, et quelques autres qui vinrent à Haïti, ne tenaient leur autorité que de leur caractère sacré et de la volonté du gouvernement qui les plaçait dans les paroisses. On a vu que Dessalines en avait institué quelques-uns avec des chantres haïtiens : ce qui était encore plus irrégulier que la nomination de C. Brelle par Christophe, en qualité de préfet apostolique ; car l’autorité temporelle ne peut donner à un homme le caractère sacré qu’un évêque seul a le droit de conférer, d’après le rituel de l’Église catholique et les pouvoirs spirituels qu’il tient de sa propre consécration à l’épiscopat. Il faut donc considérer celle de C. Brelle comme une charge publique, par la nécessité d’établir un ordre quelconque parmi les prêtres qui desservaient les paroisses de l’Artibonite et du Nord.

Dans l’Ouest et le Sud, le Président d’Haïti assignait aussi, en les plaçant dans les paroisses, la circonscription où les curés exerçaient l’administration spirituelle. Il ne nomma point de préfet apostolique, mais il toléra ce titre, pris successivement par deux prêtres qui furent curés du Port-au-Prince, Lemaire et Gaspard, qui n’y étaient nullement autorisés par la cour de Rome : ils n’exercèrent pas pour cela aucune autorité spirituelle sur les autres curés.

On peut, on doit excuser ces irrégularités commises dans les affaires religieuses, à raison des circonstances politiques. Haïti s’étant séparée de la France, et celle-ci tenant alors la cour de Rome sous son influence, sinon sous ses ordres, il était impossible qu’on s’adressât à elle pour en obtenir une hiérarchie ecclésiastique ; son autorité eût paru toujours suspecte en faveur de l’ancienne