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soldats plus disposés encore à la défection qu’il ne l’espérait. Ils devinrent à leur tour des embaucheurs dans les rangs du 3e régiment, dont les officiers et les soldats étaient aussi préparés que ceux du 7e. De ces deux corps, la défection passa au 14e qui occupait l’une des batteries élevées en face le fort Éveillard, et l’on sait qu’une partie de ce régiment s’était déjà soulevée au Gros-Morne, en faveur de la République ; ce n’étaient pas les mêmes hommes, sans doute, mais le même esprit y régnait. Le colonel Zacharie Tonnerre commandait ce corps, formé dans l’Artibonite et cantonné ordinairement aux Gonaïves.

Marc Servant et ses principaux complices dans la conjuration, se hâtèrent de la terminer avant le retour de Christophe à Drouillard ; et sachant bien que le général Magny aurait la tête tranchée, si la défection s’opérait dans les rangs de sa division, sans qu’il fît partie des troupes qui voulaient passer au service de la République, ils se décidèrent, non à lui communiquer d’avance leur dessein, mais à le lui déclarer au moment même où ils feraient connaître leur intention au fort Lamarre, pour l’entraîner malgré lui, dût-on le retenir prisonnier, afin de’le sauver d’une mort inévitable. Magny était estimé, vénéré, aimé avec raison par ses troupes : officier d’honneur, il ne fût pas entré de lui-même dans une pareille conjuration, ayant déjà prêté serment de fidélité à Christophe. S’il l’avait découverte, il eût employé tous les moyens à sa disposition pour la faire avorter ; mais il n’en sut rien, tant il y eut unanimité de sentimens parmi ces troupes.

Venant donc pour visiter la batterie, comme à son ordinaire, le 12 juin, les colonels et leurs officiers lui déclarèrent leur résolution, en présence des soldats qui ap-