Page:Ardouin - Étude sur l’histoire d’Haïti, tome 7.djvu/534

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

contre les Français, en possession du Port-au-Prince : de là, il pouvait voir ses postes avancés el leur porter secours en cas d’attaque. Son habitude était de s’y rendre surtout de nuit, pour obliger officiers et soldats à veiller, à se préserver des surprises. Un jour, l’adjudant-général Bauvoir lui fit dire, que le poste où il se tenait, était presque démantelé par l’artillerie ennemie ; il s’y rendit. Ce courageux officier lui demanda par où il voulait commencer son inspection : « Général, est-ce en dedans ou en dehors du poste ? — En dehors d’abord, lui répondit Borgella. » Et tous deux et leurs officiers en sortirent, s’exposant le plus gaîment du monde à la fusillade et à la canonna de ennemies : aucun d’eux ne fut atteint. S’étendant le jour dans un hamac placé dans son ajoupa au quartier-général, pour se reposer des veilles de la nuit, une fois il remarqua en plein midi, que le feu de l’ennemi était plus vif qu’à l’ordinaire ; croyant à une attaque projetée contre ses postes avancés, Borgella se lève et s’y rend : peu d’instans après son départ, un obus lancé contre le quartier-général, brisa l’ajoupa et tomba au milieu de son hamac en éclatant.

Pendant un de ces combats journaliers de poste à poste, Pétion portant toujours la plus grande attention à la ligne extérieure, envoya un aide de camp dire à Borgella, qu’il lui recommandait de ne pas chercher à enlever ceux de l’ennemi, mais de garder les siens : sa prudence lui conseillait de ne pas exposer le moral des troupes à s’affaiblir par un insuccès. C’est par ce motif qu’il se refusa constamment à permettre à des officiers supérieurs, d’attaquer l’ennemi sur d’autres points. Parmi eux, celui qui désirait le plus de faire de telles tentatives, était le général Gédéon dont le courage le portait à cela.