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côté et retirèrent le cadavre de l’infortuné Verger. Ce digne ami de notre cause fut vivement regretté par Pétion et Borgella[1].


On comprendra que, dans la relation du siège du Port-au-Prince, à moins d’avoir sous les yeux un journal mentionnant chaque affaire importante, chaque incident, dans l’ordre chronologique, il est impossible de tout classer d’une manière satisfaisante. Nous ne possédons pas un pareil document, et nous y suppléons par nos souvenirs et par des traditions fugitives.

Dans les lignes de la place, Pétion avait fait mettre des obusiers entre les forts Lamarre et La Croix ; ils lançaient leurs projectiles contre la batterie ennemie placée tout près du premier de ces forts. Il y en avait au fort National, qui lançaient les leur contre les batteries à proximité des redoutes N° 1er et 2. Mais l’ennemi y avait des obusiers et des mortiers ; il y répondait, et ils envoyât des bombes contre le fort du Gouvernement, près duquel nous avions nous-mêmes un gros mortier qui lui ripostait. Ses boulets tombant autant sur le palais de la présidence que sur le fort, on garnit la galerie à l’est de la chambre à coucher de Pétion, de sacs remplis de terre pour l’abriter. Un matin, une bombe de 12 pouces vint tombera quelques pas de Pétion, qui parlait à des officiers, dans la partie entre les deux ailes du palais ; elle n’éclata pas, ce qui lui fit dire avec le plus grand sang-froid : « Les artilleurs ennemis emploient de bien mauvaises mèches ! »

  1. Verger était ce Français qui se sauva des Cayes avec Borgella, en 1803, pour aller joindre les indigènes : il était notaire au Port-au-Prince, et avait enseigné à Méroné, le latin, le français et les mathématiques. À partir du jour de sa mort, on remarqua des signes d’aliénation mentale en Méroné, qui devint entièrement fou quelques années après.