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Delva lui dit : « Président, j’ai besoin de vous parler. — Je ne veux pas vous entendre, répondit Pétion ; rendez-vous en prison. — Monsieur Pétion, répliqua Delva en colère, écoutez-moi ! » Alors, le président donna l’ordre de l’arrêter, et alla dans sa chambre. En ce moment, Delva descendit les degrés de l’escalier, monta à cheval pour se rendre chez lui. L’ordre d’arrestatation resta ainsi sans effet, aucun des officiers de garde n’osant aborder un général qui venait d’apostropher le Président d’Haïti du titre de Monsieur, et qui était d’ailleurs redouté pour son courage ; sa colère en imposa.

Le général Boyer était dans les appartemens du palais ; il en sortit et cria à la garde de la barrière, au général Lamothe Aigron, au chef d’escadron Cerisier, qui venaient au palais : « Arrêtez-le ! » Mais, ni ces officiers supérieurs, ni ceux de la garde ne le firent : on feignit de ne pas comprendre un tel ordre, non précisé par le nom de celui qu’il fallait arrêter. Les pistolets de Delva qui étaient dans ses fontes, ceux qu’on a cru voir sous sa redingote, parlaient plus haut que le général Boyer : on savait que son collègue ne manquait guère un homme qu’il ajustait. On crut qu’il avait des pistolets sous sa redingote ; et c’est de là qu’on a pensé généralement alors, qu’il avait l’intention de tuer le président.

En arrivant au palais, le général Lamothe Aigron reçut l’ordre d’aller l’arrêter chez lui, avec une partie de la garde, tandis que le général Boyer envoyait le chef d’escadron Cupidon, aide de camp de service ce jour-là, chercher la garde qui était chez lui pour renforcer celle du palais. Parvenu à la barrière de la maison de Delva, située au fond de la cour, Lamothe Aigron le vit à une fenêtre et lui dit qu’il avait ordre de le conduire en pri-