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lui dit que c’était par ce seul motif qu’il avait opéré sa marche rétrograde ; et il ajouta des conseils à Rigaud pour éviter la guerre avec l’Ouest. Le 29, il informa le président de son retour au Pont, en lui envoyant copie de sa correspondance avec Rigaud, par le chef d’escadron Cerisier, aide de camp du président, qui était venu en mission auprès de lui.

Averti de la marche rétrograde de Delva, le général Rigaud vint avec ses troupes et prit position sur l’habitation Colombel, non loin du Pont-de-Miragoane.

Le 1er décembre, le président arriva au Pont avec sa carde et quelques autres troupes qui renforcèrent la colonne de Delva ; et il adressa une lettre à Rigaud, l’invitant à une entrevue sur le Pont.

Le 2, les deux chefs et leurs armées étaient en présence ; chacun était entouré d’officiers de tous grades, mais les généraux Bonnet et Lys, quoique à l’armée du Sud, ne parurent point : ils comprirent cette haute convenance.

Cette entrevue, où la guerre pouvait se décider, fournit l’occasion de remarquer l’extrême différence qui existait entre le caractère de Pétion et celui de Rigaud. En s’avançant l’un vers l’autre, Pétion avait son sabre au fourreau et ne le dégaina pas[1] : Rigaud, au contraire, dégaina l’épée qu’il portait. Le premier était d’un calme parfait, le second très-agité. Rigaud ne put s’interdire à lui-même une infinité de reproches à Pétion sur son administration, se faisant l’écho de tous les opposans, de tous les factieux de l’époque. Il prétendit justifier ainsi la séparation du Sud, afin de le soustraire à cette administration qu’il appelait vicieuse. Il lui reprocha la chute du Môle,

  1. Pétion portait toujours son sabre à la Mamelouek.