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chef d’un parti politique, cette mission avait passé à la personne de Pétion durant son exil, et que, dans l’actualité, s’opposer au Président d’Haïti, c’était se faire le chef d’une faction.

Un plus beau rôle lui était échu dans les circonstances où il trouva le pays : c’était de se faire le conciliateur entre Pétion et tous les hommes distingués qui n’approuvaient pas sa politique, de leur conseiller plus de patience et de modération dans l’expression de leurs sentimens patriotiques, pour les rapprocher du chef de l’État et rétablir l’harmonie entre eux et lui ; de se pénétrer davantage des motifs de la politique de ce dernier, de les discuter avec lui, et surtout de considérer les modifications, les transformations que la société avait subies durant le laps de dix années que lui, Rigaud, avait passées à l’étranger. Tel ne fut pas le rôle qu’il accepta : aussi se jeta-t-il promptement dans celui qui en fit le chef de la faction du sénat.

Nous avons cité Bruno Blanchet, comme l’un des hommes qui devaient, par leurs antécédens, exercer le plus d’influence sur l’esprit de Rigaud. On connaît la cause de son opposition à Pétion, de son mécontentement. Sa révocation de la charge de secrétaire d’État avait ulcéré son, cœur, quoique le président eût créé pour lui celle de secrétaire général du gouvernement. Il ne lui pardonnait pas cet acte nécessaire, de même qu’il avait gardé rancune à Dessalines pour sa destitution de trésorier à Jérémie. D’un caractère irascible, infatué de ses connaissances théoriques en matière politique et de législation, il se croyait une capacité transcendante à diriger les’conseils du gouvernement ; et comme Pétion ne se mit pas sous sa tutelle, il considéra le secrétariat