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le 7 avril, un navire des États-Unis arriva dans le port des Cayes, ayant à son bord le général André Rigaud.

Ce fut tout un événement, et pour le Sud et pour l’Ouest, formant alors la République d’Haïti.

Accueilli avec des transports d’allégresse, par les autorités et la population entière des Cayes et de la campagne, dans son lieu natal, qu’il avait été forcé d’abandonner dix années auparavant, Rigaud trouva en un jour la compensation à ses tribulations durant ce laps de temps, tant à Saint-Domingue même lorsqu’il ne lui fut pas permis de le revoir, que dans l’exil sur la terre étrangère, où il vécut avec une nombreuse famille, accablé de toutes sortes de privations. À un autre que lui, il eût suffi de ce retour heureux au lieu de son berceau, pour s’inspirer toujours des sentimens de sage modération dans la patrie qui le recevait à bras ouverts, pour faire des réflexions profondes sur la situation des choses, sur la condition nouvelle des hommes, et y conformer sa conduite. Mais il était dans sa destinée, sans doute, qu’il en fût autrement.

Le général Wagnac s’était hâté d’informer le Président d’Haïti de l’arrivée de l’ancien commandant du Sud, et Pétion s’empressa de députer vers lui un de ses aides de camp, pour le féliciter de son retour dans le pays et l’inviter à venir au Port-au-Prince : il s’y rendit. Sur toute sa route, il reçut des honneurs qui décelaient la joie des populations des villes et des campagnes. Des citoyens du Port-au-Prince allèrent au-devant de lui à plusieurs lieues ; son entrés en cette ville fut un vrai triomphe, et Pétion reçut son ancien chef avec des démonstrations de la plus sincère satisfaction, en le faisant loger au pa-