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bâtimens, et que c’était la cause de la mission de la corvette anglaise au Môle.

Quoi qu’il en fût, on n’en tint aucun compte, et la flotte quitta le Môle, emportant environ 400 blessés et beaucoup de femmes, d’ennuis et de vieillards au Port-au-Prince[1]. Elle ne tarda pas à y retourner avec de nouveaux renforts et des approvisionnemens de guerre et de bouche ; et pendant plusieurs mois, il en fut ainsi pour mettre le Môle à même de résister : en peu de temps, l’armée expéditionnaire fut portée à 4,000 hommes[2].

Un événement pénible à relater survint en cette place assiégée, dans la nuit du 6 au 7 mars : — la mort violente du sénateur Thimoté. Depuis le mois de décembre 1808, il était resté au Port-au-Prince d’où il vint au Môle avec la flotte, à la fin de février. Pendant son séjour en cette ville, il avait été témoin de la mésintelligence du sénat et de Gérin avec le président ; il sut tout ce qu’on imputait au vieux général boudeur. Soit qu’il perdît confiance dans la cause de la République qu’il avait embrassée avec chaleur, soit qu’il fût irrité par la perte de sa fortune, toujours est-il qu’à son arrivée au Môle, apprenant la désertion à l’ennemi de beaucoup de soldats de la 9e, il conçut un projet dont on ne parvint pas à saisir le but véritable. Après avoir fui la société de Lamarre avec qui il avait été si intimement lié, et s’être fait le centre des mécontens qui se plaignaient de l’abandon que le gouvernement faisait de l’armée expéditionnaire, qui reprochaient à Delva et Léger une inflexibilité trop rigoureuse

  1. Pétion eut un soin particulier de ces personnes auxquelles il fit donner des rations journalières au magasin de l’État, du linge, etc.
  2. Bulletin officiel, gazette du Port-au-Prince, du 18 juin 1809, N° 1er.