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d’Haïti. La proposition de Lys était sans doute constitutionnelle dans sa forme ; mais au fond, c’était un défi, jeté au président, de faire arrêter les factieux qu’il avait signalés. Il ne fit arrêter personne ; mais il ne répondit pas à ce message, dont le sénat avait eu encore, nous dirons, l’imprudence, d’ordonner l’impression. C’était trop de provocations faites à un chef dont on connaissait les sentimens intimes, et qui avait dans ses mains l’armée et les masses. On va voir que le sénat ne s’arrêta pas là.

Si Pétion ne répondit pas par un message à celui du sénat, il y répondit par un acte significatif, afin de prouver à ce corps qu’il entendait bien retenir les attributions du pouvoir exécutif. Le 5 décembre, il fit un arrêté ainsi conçu :

« Les commandans d’arrondissement sont indépendans les uns des autres, et rendent compte directement au gouvernement de toutes leurs opérations, jusqu’à ce qu’il en soit autrement ordonné. — Le secrétaire d’État est chargé de l’exécution du présent arrêté qui sera imprimé. »

Cet acte ne fut pas contre-signé par Bonnet, ainsi qu’il le fit par la suite pour tous ceux de cette nature, émis par le président. Mais, à travers le voile du temps, jeté sur les faits historiques ; en suivant la progression de la lutte ouverte par le sénat, on saisit la pensée de Pétion. Gérin ayant été appelé au Port-au-Prince par le sénat, pour être réactivé, ce corps pouvait lui donner le commandement, ou du département du Sud, de nouveau, ou même de celui de l’Ouest. Par son arrêté, Pétion prévenait une telle mesure et déclarait d’avance au sénat qu’il n’y souscrirait pas. Le 5 décembre, Gérin arrivait