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crire un autre, qui, par sa folle ambition, a allumé parmi nous le feu de la guerre civile, que je me vois élevé à la Présidence d’Haïti !

Le président du sénat l’invita alors à venir prendre place à sa droite. « La joie était peinte sur tous les visages… Un membre propose, vu l’état de maladie où se trouvait le Président d’Haïti, de lever la séance.[1] » Cette proposition constate clairement la cause de sa non comparution à la séance de son élection.

Pétion retourna à sa demeure avec le même cortège qui l’avait accompagné au sénat. Ce corps se sentit enfin à l’aise, après l’avoir investi du pouvoir de présider aux destinées de la République ; car il était assuré en quelles mains il avait remis les rênes du gouvernement. L’armée et le peuple partagèrent sa confiance.

« La nomination du général Pétion à la présidence inspira aux citoyens sages et vraiment éclairés, aux laboureurs et aux troupes de l’Ouest, la plus grande confiance en l’avenir. Les partisans de Gérin éprouvèrent un mécontentement qu’ils ne craignirent pas de témoigner et qu’ils formuleront sous peu en conspiration.[2] »

Il n’y eut pas seulement que l’Ouest qui fut satisfait de la nomination de Pétion, le Sud le fut également ; et quand, trois années après, Gérin formula son mécontentement en conspiration, il ne compta pas plus de cinq à six partisans dans ce dernier département. Voilà la vérité.

L’influence de Pétion sur ses collègues au sénat était si réelle ; ils avaient une telle confiance en lui, que, deux jours après qu’il eût prêté son serment, le sénat rendit un arrêté, le 12 mars, par lequel il l’autorisa à proposer seul les candidats aux emplois vacans de l’administration.

  1. Procès-verbal de la séance du 10 mars 1807.
  2. Hist. d’Haïti, t. 3, p. 413.