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vaux et autres choses accessibles à leur avidité, appartenant à Magloire Ambroise, — de même qu’ils avaient agi envers Yayou quelques mois auparavant. On conçoit encore ces mauvaises actions de la part de la soldatesque et des gens du peuple, incapables de comprendre, dans tout pays, le respect dû à la propriété ; mais de la part des autorités, des chefs dont plusieurs étaient sénateurs, législateurs du pays, confisquer ou même séquestrer les propriétés d’hommes qu’on accuse, sous l’empire des lois, d’une constitution républicaine, qui garantissaient les droits de tous, de tels actes doivent entraîner la réprobation sévère de l’histoire.

Et encore, s’il n’y avait que cela à signaler à la postérité ! Mais ces malheureux accusés furent inhumainement assassinés, par le détachement qui les conduisait, lorsqu’ils arrivèrent au Cabaret-Carde, au pied des montagnes, à l’entrée de la plaine de Léogane. Qui donna cet ordre arbitraire, barbare, révoltant, à l’officier exécuteur commandant du détachement ? C’est un mystère qui est resté dans les ténèbres et que l’histoire ne peut malheureusement dévoiler. Si ces infortunés étaient réellement complices de la conspiration, ne pouvait-on pas les faire juger par la commission permanente de Jacmel, d’après la loi ? Et pourquoi cette précaution, que la situation n’exigeait pas, de sembler les envoyer au Port-au-Prince, pour les faire assassiner en route ?[1] S’ils étaient coupables, ce qui ne devait être prouvé que par un ju-

  1. Laverdure prétendit, dit-on, que quoique liées, ces victimes avaient tenté de résister au détachement. Parmi ces malheureux, on cite les noms de Jacob Boom, Ambroise, Sylvestre, Georges, etc. On les accusa d’avoir excité Magloire Ambroise à la conspiration, parce qu’ils étaient mécontens de la loi du 23 avril 1807, sur le commerce, qui abrogea celles de Dessalines relatives aux consignations. S’il y avait des indices suffisans à ce sujet, ils devaient être jugés à Jacmel ; l’arrêté du sénat sur le code pénal militaire avait créé une commission permanente dans cette ville. Bonnet et Dnvid-Troy ne l’ignoraient pas.