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Boisrond se réuniront ici, sous la protection des généraux, à l’effet de s’occuper de travailler au mode de constitution et lois organiques qui devront régir l’île, qui me sera présenté sous le plus bref délai.
Signé : Dessalines.


Le 22 du même mois, il rendit un décret[1] qui ordonnait aux généraux commandans des divisions, de faire arrêter toutes les personnes (les blancs) qui seraient convaincues ou soupçonnées d’avoir pris part aux massacres et aux assassinats ordonnés par Leclerc et Rochambeau, afin de les livrer « au glaive de la justice. » Il était recommandé à ces généraux de prendre toutes les informations nécessaires dans la recherche des preuves, pour ne pas s’exposer à faire périr des innocens. Les noms des suppliciés devaient être envoyés au gouverneur général pour être publiés ; et tout chef qui aurait sacrifié à son ambition, à sa haine ou à toute autre passion, des individus dont la culpabilité n’aurait pas été préalablement prouvée, subirait lui-même la mort, et ses biens seraient confisqués, moitié au profit de l’État, moitié au profit des héritiers des victimes innocentes, s’il s’en trouvait dans le pays.

Mais, à quel tribunal les accusés devaient-ils être traduits, lorsqu’il n’y en avait aucun d’établi ? Les chefs seuls devenaient juges des accusés. On conçoit alors qu’un tel acte n’était ainsi rédigé, que pour donner un vernis de formes et de justice aux immolations qui allaient s’ensuivre. Cela est si vrai, que le gouverneur général fit commencer aux Cayes les exécutions sur quelques Français.

  1. Dans son Recueil des lois et actes du gouvernement d’Haïti, tome 1er , M. S. Linstant date cet acte des Gonaïves ; mais c’est une erreur, le gouverneur général était alors aux Cayes.