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déjà au choc des dragons de l’Artibonite et du Nord. En vain il ordonna de leur opposer Bastien et Baude avec leurs escadrons ; cette cavalerie, qui devait protéger sa retraite, participa à la déroute de l’infanterie. Yayou lui-même avait fait d’inutiles efforts pour contenir les républicains et rétablir le combat. En un instant, généraux, officiers et soldats se trouvaient contraints de fuir dans la grande route, devant la cavalerie ennemie.

Christophe put alors arriver à Sibert, suivi des corps du Nord sous les ordres du général Romain. On a dit qu’au moment où il voyait fuir la 4e et la 7e, chassées par Gédéon, il avait pris la giberne et le fusil d’un grenadier, en descendant de son cheval, sans doute pour inspirer de la confiance aux soldats. Si le fait est vrai, il l’honore.


Pendant la déroute des républicains, se jetant les uns sur les autres, Pétion, monté sur un pauvre cheval, peu cavalier d’ailleurs, ne put aller aussi vite que les autres officiers supérieurs qui réussirent bientôt à gagner le Port-au-Prince. Son chapeau galonné, surmonté d’un panache rouge selon le costume décrété le 2 janvier 1804, attirait l’attention de la cavalerie ennemie ; les officiers criaient : « Prenez ce général ! »

En ce moment, Pétion était entouré de David-Troy, Bédouet, Bouzy, Covin et Coutilien Coustard. Au cri poussé par l’ennemi, Coutilien vit, comme ses compagnons, le danger qui menaçait son général ; il se dit sans doute : « La République va périr avec lui ! » Le cœur de ce brave jeune homme n’éprouva plus qu’un sentiment : ce fut de se dévouer généreusement au salut de l’un et de l’autre. Dans ce noble but, il s’approcha de Pétion, jeta son propre chapeau et lui enleva le sien dont il se coiffa,