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cause de la guerre civile qui éclata entre les Haïtiens, dans la journée du 1er janvier 1807.

En effet, on a dû voir — d’un côté, de légitimes aspirations à la jouissance de tous les droits de l’homme en société ; — de l’autre, d’injustes prétentions à la domination, au pouvoir absolu, guidé par le seul caprice de l’individu.

Voilà la cause unique de cette guerre. Ce fut la lutte de la Liberté contre le Despotisme, de la Démocratie contre l’Autocratie, des idées progressives contre les idées stationnaires, rétrogrades.

Si Pétion personnifiait le système politique qui avait pour but de garantir au peuple la jouissance de ses droits, — Christophe était le représentant du système absolument contraire : on le comprendra encore mieux en comparant leur gouvernement, leur administration, leur conduite respective. Après l’énergique attentat contre Dessalines, Pétion voulait substituer des institutions libérales à celles qui avaient régi le pays depuis la déclaration de l’indépendance. Christophe ne voulait qu’une simple substitution de personne au pouvoir.

Dans cette opposition de vues, dans cet antagonisme d’idées purement politiques, on ne peut pas apercevoir la moindre pensée de couleur ni de caste, comme cela a été si souvent répété, peut-être par l’ignorance des faits. En proposant à Geffrard et à Pétion de se défaire de Dessalines, Christophe n’était pas mu, certainement, par une telle pensée : alors, pourquoi voudrait-on la reconnaître, de leur part, dans l’acquiescement à ce projet ? En proclamant Christophe chef du gouvernement, les complices de Geffrard, aux Cayes, Gérin et Pétion lui-même ont tous agi de manière à prouver le contraire de ce qu’on