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phe et à Pétion, et que nous trouvons dans l’Histoire d’Haïti, voyons comment son auteur parle de la disposition des soldats de l’Artibonite et du Nord, dans ces momens, d’après les traditions orales.

« La désertion continuait loujours dans les troupes de l’Artibonite ; les soldats abandonnaient leurs drapeaux et se rendaient au Port-au-Prince. Les autorités de cette ville qui, par des agents secrets, s’efforçaient de répandre le trouble dans le Nord et l’Artibonite, favorisaient ces désertions… Du Sud et de l’Ouest il n’y avait aucune désertion dans le Nord et l’Artibonite, parce que la licence que Pétion et Gérin toléraient, rendait le peuple et le soldat contents.[1] »

Voilà sans doute une accusation bien formulée, et contre les autorités du Port-au-Prince, et contre Pétion et Gérin. Gérin tolérait la licence ! C’est une grave erreur de l’auteur que nous citons, sur ce caractère despotique qu’une femme seule put dompter dans un moment suprême.[2] Nous passerions condamnation encore à l’égard de Pétion et des autorités qui étaient sous ses ordres, si nous ne lisions pas, immédiatement après cette accusation, l’explication des causes de cette désertion :

« En abandonnant le Nord et l’Artibonite, on fuyait les rigueurs de Christophe dont le caractère (farouche) ne souffrait aucune indiscipline. »

S’il débuta par des rigueurs dans l’exercice de son autorité, au lieu d’user de modération comme fit Pétion, pour calmer l’effervescence des esprits, la désertion des soldats s’explique par cette différence même, et il n’est pas juste

  1. Hist. d’Haïti, t. 3, p. 355.
  2. Le fait relatif aux officiers de la 15e prouve que Gérin ne pouvait tolérer quoi que ce soit de contraire à la subordination.