Page:Ardouin - Étude sur l’histoire d’Haïti, tome 6.djvu/400

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

ayant osé créer, instituer des prêtres catholiques avec des chantres de paroisses ; ils voyaient les mœurs de plus en plus relâchées, par l’influence du scandale publie que donnait l’empereur avec des courtisanes, décorées du nom de maîtresses, d’amies de Sa Majesté ; et cela, sans respect pour son auguste et vertueuse épouse ! Enfin, ils voyaient le trésor public, fournissant libéralement les deniers de l’État à ces courtisanes, tandis que l’armée était privée de tout. La révolution était dans tous les esprits, dans tous les cœurs !

Les choses en étaient déjà à ce point, quand l’empereur convoqua tous les généraux à la capitale de l’empire pour solenniser avec lui le second anniversaire de l’indépendance nationale. C’est à cette réunion consacrée à la joie, à la fraternité militaire qui l’unissait à ses lieutenans, qu’il conçut la coupable pensée d’immoler à ses injustes préventions deux des plus méritans, Pétion et Geffrard qui l’avaient tant aidé dans son œuvre glorieuse, par leur dévouement : il les suspectait de vouloir favoriser le retour de Rigaud dans le pays, pour en faire un chef supérieur. Détourné dans ce projet barbare par H. Christophe, dont la vie n’était pas plus en sécurité, celui-ci exploita cette circonstance au profit de son ambition, en en donnant avis à ses frères d’armes. Il en résulta une conjuration entre eux pour abattre le dictateur. Geffrard se chargea de la mettre à exécution dans le Sud, où les esprits étaient plus faciles à prédisposer à cet attentat, l’empereur devant s’y rendre sous peu de temps. Mais la mort prématurée de ce général, influent et énergique, vint faire évanouir cette conjuration.

Cependant, il avait déjà communiqué sa résolution à des officiers secondaires, en leur faisant connaître son