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du peu de sincérité qui existait entre l’Ouest et le Nord.[1] »

Présenter ainsi la position de l’Ouest particulièrement, c’est-à-dire de Pétion qui en personnifiait les idées politiques, c’est donc offrir d’avance une excuse à tout ce que va faire H. Christophe, c’est approuver la conduite qu’il a tenue.

Lorsqu’une révolution a lieu, la société tout entière devient méfiante envers le gouvernement nouveau qu’elle veut établir ou celui qu’elle se borne à réformer. C’est un sentiment universel qui se reproduit dans tous les siècles et cheiz toutes les nations, et il est d’autant plus vif qu’on connaît déjà les antécédens de l’homme que les circonstances désignent au pouvoir ; on le voit même se manifester, alors que l’opinion n’en a pas désigné un. Ce sont des sûretés qu’on prend pour l’avenir, en raison du passé avec lequel on vient de rompre. Loin de manquer de sincérité, ce sentiment de méfiance est au contraire très-sincère, parce qu’il est dans la nature des choses[2].

Bonnet et une trentaine d’autres officiers ou citoyens quittèrent le Port-au-Prince, le 22 octobre, pour se rendre par mer au Cap. Nous dirons dans un autre livre comment il accomplit sa mission.


Les officiers supérieurs des Cayes étaient arrivés au Port-au-Prince, le 19 octobre, et avec eux, Borgella, Da-

  1. Hist. d’Haïti, t. 3, p. 338.
  2. Pour appuyer ces assertions, faudrait-il citer la révolution d’Angleterre, celle des États-Unis, celle de 1789 eh France, et d’autres encore dans ce dernier pays ? J’ai assisté à la discussion de sa constitution républicaine de 1848, et j’ai vu, j’ai compris ce que j’avance ici. Mieux que moi, qui étais au cachot, M. Madiou a dû voir et observer les mêmes choses dans la discussion de la constitution de 1813, au Port-au-Prince.