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peu plus loin, » lui répondit-on. Racolier fît faire halte vers l’habitation Pemerle. Aussitôt Moreau descendit de cheval et demanda un crayon pour écrire quelques lignes sur ses affaires d’intérêt ; il donna cette note au capitaine Moulite Tuffet, en le priant de la remettre à sa femme. Il s’accusa alors d’avoir obéi trop aveuglément aux ordres de Dessalines. Sur le point de recevoir la mort, il pria qu’on lui permît de confier encore quelques paroles au même officier pour être rapportées à sa femme. Quand il eut satisfait à ce désir, il dit : « Mes amis, tirez maintenant. » Les officiers des dragons déchargèrent leurs pistolets sur lui, à deux pas : il tomba mort. Racolier et son escadron reprirent alors la route des Cayes, laissant le cadavre à terre.

La Veuve de Geffrard, ayant appris cet événement, vint sur les lieux ; en chrétienne charitable, elle oublia les torts de Moreau envers son mari, ensevelit son cadavre et lui fit donner la sépulture. Ce noble trait de générosité recommande la mémoire de cette femme à l’estime de la postérité, de même qu’elle ne peut refuser son admiration à Madame Abel, pour l’énergie qu’elle montra.

Dans la même journée du 16 octobre, Faubert, David-Troy, Borgella et la plupart des chefs des Cayes partirent pour se réunir à l’armée du Sud qu’ils rejoignirent au Port-au-Prince. Papalier emmena Inginac avec lui[1].

Après leur départ, dans la soirée, le chef de division navale Aoua, qui se trouvait en prison depuis plusieurs jours, pour s’être montré un ardent partisan de Dessa-

  1. Papalier n’arriva au Port-au-Prince que le 22 octobre. Racolier resta aux Cayes en qualité de commandant provisoire de la place et même de l’arrondissement, vu l’absence de Beauregard, de Papalier et de Wagnac.