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du domaine public. C’était donc plutôt à lui qu’à l’autorité judiciaire, que revenait la mission de juger et de reconnaître les droits des citoyens qui se prétendaient propriétaires des biens qui avaient réellement appartenu aux colons, et qui présentaient des actes translatifs de ces propriétés et plutôt simulés ou extorqués que réels. Tout ce qu’on avait à attendre de lui, c’était qu’il ne mît aucune passion dans l’examen de ces actes, qu’il prescrivît des formalités à observer par les particuliers, dont les titres d’anciennes propriétés avaient pu se perdre dans le cours de la révolution[1].

S’il est vrai comme cela paraît assez constant, que Boisrond Tonnerre, dans ses vues perfides, poussait Dessalines à des actes arbitraires pour le faire haïr, il est à remarquer qu’il fut le rédacteur du décret du 1er septembre, qu’il le contresigna eu l’absence de J. Chanlatte, et que cet acte, suivi de la lettre à Inginac, du 8, contribua beaucoup à ce funeste résultat.

Un autre décret publié le 2 septembre par l’empereur, tend à prouver que, s’il trouva tant d’irrégularités et de fraudes dans l’administration des Cayes, à l’égard de laquelle il était hostile à cause des préventions qu’il avait contre les personnes, son gouvernement en était en quelque sorte responsable, pour n’avoir pas réglé les finances ou leur perception plus convenablement depuis trois ans

  1. C’est ce que fit le Sénat de la République d’Haïti, peu de mois après la mort de Dessalines, par les lois des 9 fevrier et 16 mars 1807. Il maintint les dispositions de l’art. 19 de l’arrêté du 7 fevrier 1804, pour toute la durée de la guerre civile existante alors et une année après sa fin, en ne reconnaissant qu’au gouvernement seul le droit de statuer sur ces sortes de réclamations ; car, de même, que Dessalines, le Sénat devait sauvegarder les intérêts du domaine public contre l’avidité des particuliers. Les citoyens durent subir cette nécessité du temps, entourée d’ailleurs des formes douces qu’un gouvernement doit mettre dans de tels cas.