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« Cette première impulsion donnée (celle qui tendait à exciter Dessalines aux voies extrêmes contre le Sud), un des conjurés, durant le séjour de Dessalines aux Cayes, demanda au sieur Baillio, imprimeur alors de cette ville, et obtint de lui un appartement dans la cour de la maison qu’il occupait, pour y donner un repas d’amis, et chargea ledit sieur Baillio, sous le sceau du secret, de faire à cet effet tous les préparatifs nécessaires : en conséquence, l’argent lui fut amplement donné. Au jour et à l’heure indiqués, dans la soirée, Boisrond Tonnerre, Mentor et Borno Déléard se rendirent au lieu du festin, où toutes les précautions furent prises pour que nulle personne (excepté le sieur Baillio) n’y entrât. Après le repas, on passa aux toasts. Le premier fut porté au nouveau Ministre de la guerre, c’est-à-dire à Mentor qui y a répondu ; ensuite au nouveau Ministre secrétaire d’État : c’était à Boisrond Tonnerre qui y a répondu aussi ; après, au nouveau Ministre des finances : c’était à Borno Déléard, qui y a également répondu.

« Dès lors, le sieur Baillio comprit qu’indubitablement il dut exister une conjuration contre Dessalines et son gouvernement ; mais au résultat, il ne put savoir quel fut le nouveau chef et le nouveau gouvernement que l’on avait en vue. Sur tout ce qui s’était passé et sur ce qui pourrait avoir lieu par la suite, un secret inviolable, sous peine de mort, fut recommandé au sieur Baillio.

« Dessalines quitta les Cayes et retourna dans l’Ouest. Peu après son départ de cette ville, M. Baillio reçut sous son couvert un écrit en forme de décret, comme ayant été rendu par Dessalines, à Marchand, portant proscription, pour ainsi dire, contre les gens les plus éclairés des classes jaune et noire. Lui, le sieur Bail-