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par sa capacité incontestable, mais par le zèle qu’il avait montré au Port-au-Prince et à Jacmel : dans l’Ouest, il avait fait entrer 562 propriétés aux domaines publics.

En attendant l’arrivée de ce fonctionnaire, l’empereur se livrait à tous les plaisirs avec sa principale maîtresse, Euphémie Daguilh, à la danse dans les bals qu’il donnait. À son exemple, les officiers qui formaient son nombreux état-major, moins quelques-uns des plus respectables, se livraient aussi à tous les divertissemens. Le deuil universel qu’avait fait naître la mort inopinée de Geffrard, soupçonnée d’empoisonnement, en était d’autant plus froissé ; le flot de la haine montait incessamment contre l’empereur, responsable aux yeux de tous, malgré le caractère sacré et inviolable de sa personne, déclarée telle par la constitution.

Pendant ce temps de plaisirs auxquels ils participaient largement, Boisrond Tonnerre, Mentor et Borno Déléard, tenaient entre eux un conciliabule dont nous donnons les particularités, d’après des notes que nous tenons depuis longtemps, d’un citoyen respectable qui était alors employé près du général Moreau, et à la véracité duquel on peut, selon nous, ajouter toute croyance. Lui-même n’en a eu connaissance qu’après la mort de Dessalines, et a reçu la confidence de ce fait, de Baillio, Franco-Haïtien, qui était imprimeur aux Cayes ; et c’est encore d’après lui que nous avons rapporté ce qui est dit plus avant de ces trois âdjudans-généraux de l’état-major de l’empereur. Nous consignons ici sa propre narration[1].

  1. André Pilié, ancien administrateur à Jacmel, secrétaire d’Etat au moment du renversement de Boyer. En 1814, Baillio, qui avait pris parti avec les indépendans de la Côte-Ferme, vint à Jacmel où il raconta de nouveau ces faits à Pilié.