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supérieurs, commandans de places ou d’arrondissemens, et obtenaient de ces chefs de contraindre les capitaines de navires à se consigner à eux, pour avoir plus de profit. Ce décret eut pour but de faire cesser ces manœuvres ; il ordonna un tour de rôle par numéro des patentes obtenues : désormais, les capitaines étrangers se consignèrent, non en raison de la confiance que leur inspirait tel ou tel négociant pour la gestion des intérêts qui leur étaient confiés par les armateurs de l’étranger, mais en raison du numéro des patentes et du jour de leur arrivée dans les ports. Une telle disposition, il faut en convenir, n’était pas favorable à la liberté du commerce ; c’était lui imposer des entraves.

On ne doit pas s’étonner de la participation des officiers supérieurs au commerce des négocians, ni des violences qu’elle occasionnait, lorsqu’on saura que le général en chef de l’armée faisait aussi le commerce au Cap, par son association avec des négocians, et que l’empereur lui-même était intéressé dans l’établissement commercial d’un Franco-Haïtien, nommé Brocard, résidant à Saint-Marc : des faits postérieurs à ce décret, en février 1806, en ont donné la preuve, à propos de la cargaison d’un navire de Jacob Lewis, nommé l’Empereur, dont la République d’Haïti a payé le reliquat en 1821[1].


Telle fut la législation qui suivit la publication de la constitution impériale ; six lois et six décrets : il n’y en

  1. Cela résulte d’une petite brochure publiée en 1822, après des réclamations faites auprès du gouvernement haïtien, par M. Jacob Lewis. C’est par erreur que l’Hist. d’Haïti, t. 3, p. 183, place l’assassinat de Brocard à la fin de 1804 : cette brochure parle de la vente de la cargaison dont s’agit, au 24 février 1806, et elle fut livrée à Brocard ; son assassinat a donc eu lieu dans cette année, et non pas en 1804.