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nir en attendant une loi à cet effet, et laisser agir les conseils spéciaux. Et quelle organisation que celle du ministère public qui ne pouvait agir d’office pour la poursuite des délits, qui n’était qu’entendu dans les accusations intentées comme en matière civile, qui requerrait seulement pour la régularité des formes et pour l’application de la loi !

Les greffiers de ces tribunaux étaient inamovibles, nommés à vie, et ne pouvaient être destitués que pour cause de prévarication jugée. Ils fournissaient un cautionnement de 18 mille livres (douze mille francs), reçu par les juges.

Ces greffiers jouissaient donc de plus de garantie que les juges.

C’était aux conseillers d’État (les généraux) du lieu du siège des tribunaux, à les installer, en faisant prêter aux juges le serment « de maintenir de tout leur pouvoir la constitution de l’Empire, d’être fidèles à l’Empereur et au peuple, et de remplir avec exactitude et impartialité les fonctions de leurs offices. — Après ce serment prêté, les conseillers d’État, descendus dans le parquet, installeront les juges, et, au nom du peuple, prononceront pour lui, l’engagement de porter au tribunal et à ses jugemens, le respect et l’obéissance que tout citoyen doit à la loi et à ses organes[1]. »

  1. Les conseillers d’Etat prenaient cet engagement de respect et d’obéissance, pour le peuple, mais non pas pour eux-mêmes. Aussi on raconte qu’un général très-aimé de l’empereur, ayant annulé le jugement d’un tribunal, le commissaire impérial s’empressa de donner connaissance de ce fait à l’empereur, espérant qu’il maintiendrait le jugement, en lui citant même la loi sur laquelle il était motivé. Mais l’empereur lui répondit assez gaîment : « Allons donc ! Quand je fais des lois, c’est pour prouver aux blancs que nous savons en faire comme eux. Un tel a bien fait d’annuler ce jugement. »