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élevés, et qui a fait preuve par la suite de beaucoup de modération, pensa qu’il était convenable d’adresser une lettre aux officiers supérieurs opposés à son débarquement, pour les inviter à ne faire aucune résistance. Selon P. de Lacroix qui était chef d’état-major de la division française, ils lui répondirent : « que d’après les services rendus par les noirs à la France et à la colonie, ils étaient indignés de voir que le nom de leur général en chef (T. Louverture) ne fût pas même cité dans la proclamation du Premier Consul ; que ce silence décelait de mauvaises intentions ; mais que des mesures pour conserver la liberté étaient prises depuis longtemps ; que si l’on brusquait un débarquement, sans les ordres du gouverneur général T. Louverture, il serait tiré trois coups de canon d’alarme, et que ce signal, répété de morne en morne, serait celui de l’incendie de la colonie et de l’égorgement de tous les blancs. »

Si telle fut la réponse des officiers supérieurs, elle était convenable par les menaces faites dans le but d’empêcher le débarquement ; mais non avec le projet arrêté, quant aux blancs, de les mettre réellement à exécution : car, quoique les blancs fussent satisfaits de l’arrivée de l’expédition française, on n’avait pas plus le droit de les égorger, que d’égorger les mulâtres et les noirs qui l’étaient aussi.

Quand H. Christophe écrivit à Leclerc, il menaça d’incendier le Cap, mais non pas d’égorger les blancs ; il n’en fit pas tuer un seul, et il fit bien. Sa modération envers eux mérite des éloges.

Après la réponse faite au général Boudet, Lamartinière se porta à l’arsenal pour avoir des munitions pour les troupes ; et sur le refus opiniâtre du chef de bataillon Lacombe, qui alléguait que le général Agé ne lui en avait