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pont, Bellegarde et Millet, exceptés de l’amnistie de 1800 de choisir eux-mêmes le parti politique qui leur parut meilleur, d’après leurs convictions. En 1802, si T. Louverture laissa un libre choix à ses enfans, il eut tort d’en vouloir à ces officiers à cette époque : ils n’étaient pas plus obligés de soutenir sa cause contre Rigaud, que son propre fils contre l’autorité française qui venait lui enlever le pouvoir. Ce ne fut pas la couleur de Rigaud qui porta Pétion et les autres à passer dans les rangs de son armée, de même que ce ne fut pas la couleur de Leclerc qui détermina Isaac ; mais bien les idées politiques qu’ils attachaient à l’une et l’autre cause, dans ces deux circonstances.

Néanmoins, Placide, fils d’un mulâtre, n’était pas le seul de sa classe qui donnait alors à T. Louverture des témoignages de son attachement. Le général Vernet, qui avait épousé sa nièce, femme de couleur aussi ; le chef d’escadron Morisset, de sa garde d’honneur ; le capitaine Marc Coupé, son aide de camp, et d’autres encore, restèrent attachés à l’ex-gouverneur de Saint-Domingue. En les voyant autour de lui, en apprenant la conduite de Gabart à Saint-Marc, celle de Lamartinière, ancien officier du Sud, au Port-au-Prince, il dut se convaincre qu’il avait eu tort de généraliser ses persécutions contre cette classe ; et tout fait penser, en effet, qu’il reconnut alors qu’il avait été la dupe de cette politique perverse qui l’arma contre elle.

Les habitans des Gonaïves n’ignoraient pas la dernière réponse faite par Leclerc à l’ex-gouverneur ; et le voyant disposé à combattre, ils le supplièrent de permettre l’envoi d’une députation auprès du capitaine-général, pour essayer de le détourner de son projet de marcher contre lui. T. Louverture le permit ; mais, parvenue au Cap, la