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voulait pas être son lieutenant-général. » Il ajouta « qu’il contribuerait de tout son pouvoir au rétablissement de l’ordre et de la tranquillité ; mais que si Leclerc persistait à marcher contre lui, il se défendrait, quoiqu’il eût peu de troupes. »

Cette réplique fut apportée à Leclerc par une ordonnance qui revint dire de sa part à T. Louverture, « qu’il n’avait point de réponse à lui faire, et qu’il entrait en campagne. » On était alors au 16 février.


Nous avons relaté tous les faits ci-dessus, d’après les mémoires de T. Louverture et d’Isaac. Mais, en l’absence d’un texte précis de l’un et de l’autre sur la scène qui eut lieu entre l’ex-gouverneur et ses fils, le lecteur concevra que nous avons dû nous en tenir à ce qu’il y a de vraisemblable, pour ne pas courir le risque de faire un roman, de même que Pamphile de Lacroix. Selon cet auteur, on avait su au Cap les détails de cette scène par une lettre d’Isaac, annonçant que la tendresse de sa mères opposait à son retour[1]. Et, entre autres motifs que T. Louverture fît valoir pour autoriser la résistance qu’il allait faire au capitaine-général, il aurait dit : « qu’entre la France et lui il y avait sa couleur (les noirs), dont il ne pouvait compromettre les destinées en se mettant à la merci d’une expédition dans laquelle figuraient plusieurs généraux blancs (Desfourneaux, Rochambeau, Kerverseau), ainsi que Rigaud, Pétion, Boyer, Chanlatte, etc., tous ses ennemis personnels… et que, si l’on ne savait pas ménager les noirs lorsqu’ils avaient encore

  1. Lettre adressée à Leclerc, d’après l’ouvrage de Thibaudeau, t. 3, p. 123.