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près de lui pour partager son sort, — ou de retourner auprès de Leclerc pour défendre la cause de la France à laquelle ils devaient leur éducation. Il ajouta que, quel que fût le parti qu’ils choisiraient, il les estimerait toujours.

Placide et Isaac essayèrent, par des supplications, de le porter à renoncer à sa résolution de combattre l’armée française ; mais ce fut en vain. Alors Isaac, son propre fils, lui déclara qu’il ne porterait jamais les armes contre la France, qu’il lui resterait toujours fidèle. Placide, au contraire, simple fils d’adoption, reconnaissant des bontés de T. Louverture, et se dévouant, s’identifiant avec lui, lui déclara qu’il le suivrait partout pour subir la même destinée que lui.

Ce dut être néanmoins un moment douloureux pour le cœur de T. Louverture, de se voir abandonné par son propre fils, dans une telle conjoncture ! Mais heureux et fier du dévouement de Placide, il le promut immédiatement au grade de chef d’escadron.

Réunissant aussitôt le bataillon et les deux escadrons de sa garde d’honneur qui étaient aux Gonaïves, il leur présenta Placide, avec cet orgueil qui sied si bien à un père et un chef dans une circonstance semblable ; il leur dit que la réponse qu’il avait reçue de Leclerc ne lui laissait aucune alternative ; qu’il était résolu à combattre pour défendre la liberté qu’on voulait ravir aux noirs. À ces mots, tous ces braves répondirent : « Nous combattrons avec vous.  »

Encouragé par l’attitude de cette poignée de défenseurs, T. Louverture répondit à Leclerc : « qu’il ne se rendrait pas auprès de lui au Cap ; que sa conduite ne lui inspirait pas assez de confiance ; qu’il était prêt à lui remettre le commandement de la colonie, mais qu’il ne-