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avant à la troupe de l’avant-garde. Mais Férou, Jean-Louis François et Bazile étaient aux Karatas ! Quels que fussent les efforts de Borgella et de Sarqueleux lui-même, il ne leur était pas possible d’enlever la position : alors Sarqueleux ordonna à Bernard le mouvement sur la gauche. Cet officier ayant été tué à la première décharge des indigènes, sa troupe se mit à fuir et entraîna la déroute des Polonais qui combattaient de front : environ 300 hommes étaient déjà tués ou blessés.

Sarqueleux pria Borgella de prendre le commandement de l’arrière-garde, en lui disant d’abandonner les blessés : il se hâta de gagner le bourg des Coteaux. Loin d’obéir à ses ordres concernant les blessés, Borgella les sauva tous : parmi eux se trouvaient aussi des indigènes. Les bâtimens de guerre avaient suivi le littoral ; ils recueillirent les débris de la colonne, blessés et autres, et les portèrent aux Cayes où Sarqueleux mourut peu de jours après.

Informé de la bravoure qu’avait montrée Borgella aux Karatas, de sa sollicitude pour les blessés, Brunet lui adressa publiquement les éloges les plus chaleureux. Il reçut des Polonais un autre témoignage bien flatteur de leur estime : ils demandèrent qu’il fût mis à leur tête, ce qu’il refusa, car il éprouvait, le plus vif regret d’avoir été obligé de combattre contre ses anciens camarades d’armes.[1]

  1. En 1821, un Français, venu en Haïti pour y fonder une pharmacie, apporta à Borgella une lettre de recommandation du général Brunet, qui lui renouvelait la haute estime qu’il avait conçue pour lui en 1803 : il lui disait qu’il n’était pas étonné que Borgella fût parvenu à occuper un rang distingué dans l’armée haïtienne.

    Un de ces braves Polonais, qui devinrent Haïtiens en 1804, s’attacha au service de Borgella, à qui il portait les sentimens d’un ami dévoué : il se nommait Simon, natif de Grodno. En vain Borgella lui offrit des moyens pour se