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Port-au-Prince et de la Croix-des-Bouquets, qui se virent contraints de fuir de ces lieux, pour ne pas être pendus ou noyés par Rochambeau.

Au Port-au-Prince se trouvait le général Devaux, en qualité de commandant de l’arrondissement. Ce loyal Français, ayant des sentimens bien différens de ceux de Rochambeau, son chef immédiat, accueillait avec fraternité la population indigène : il se dégoûta bien vite des horreurs que faisait commettre son chef, et demanda au capitaine-général l’autorisation de retourner en France. Rochambeau lui-même n’était pas satisfait d’avoir sous ses ordres un officier dont les sentimens et la conduite contrastaient tant avec les siens. Leclerc consentit à l’éloignement de Devaux, de la colonie. Un tel homme gênait le plan de l’expédition. Devaux se rendit d’abord aux Gonaïves.

Pétion, qui avait opéré le désarmement des cultivateurs dans les montagnes de l’Àrcahaie, s’y trouvait encore avec la 13e demi-brigade, quand il reçut l’ordre de Rochambeau de se porter à Plaisance, où les mouvemens insurrectionnels de Sylla faisaient concentrer d’autres troupes coloniales. Lorsqu’il passa près des Gonaïves, le général Devaux vint le joindre et arriva avec lui et son corps à Plaisance. Là se trouvait Brunet, et Pétion y prit cantonnement. Il paraît que le général Devaux, en prenant congé de cette troupe d’élite, pour aller s’embarquer au Cap, lui adressa un discours énergique où il l’engageait à conserver soigneusement ses armes, pour défendre sa liberté menacée par le nouvel ordre de choses. C’était dire à chacun de ces anciens soldats de Rigaud, ce qui était déjà dans leur pensée et dans celle de leur chef actuel. On était alors aux derniers jours de juillet.